Plaintes, démissions et intox A la mairie de Menton, une guerre de succession digne d’une série de télévision
Dans les rues, sur les terrasses, pendant les parties de pétanque sur la plage des Sablettes, à la caisse du supermarché Carrefour, on ne parle plus que de « ça ». Mais seulement entre amis ou gens de confiance. Les commerçants mentonnais préfèrent commenter à voix basse, tant le sujet est sensible. Un des bouchers du marché refuse même de répondre aux questions : il a peur de perdre des clients. Plusieurs fidèles auraient cessé de venir acheter leur bifteck après une remarque qui serait mal passée, il y a quinze jours.
« Cette ville est un petit village », assure Anne-Marie Gameno-Morena, une retraitée de 73 ans, attablée au café avec son mari, son ex-mari et son petit-fils. Menton compte environ 30 000 habitants logés pour l’essentiel dans des immeubles colorés de carte postale. Ici, les rumeurs circulent plus vite que les coups de mer.
Le sujet qui brûle toutes les lèvres, c’est la guerre ouverte que se livrent Yves Juhel et Sandra Paire, les deux premiers adjoints de Jean-Claude Guibal, le maire en place depuis 1989 mort soudainement le 25 octobre 2021, à l’âge de 80 ans. Le tout sur fond d’enquêtes judiciaires mettant en cause le clan de ce baron de la politique azuréenne, député Les Républicains de 1997 à 2017, soupçonné par le parquet de Nice de faits de « corruption », « prise illégale d’intérêts » et « détournement de fonds publics ».
Au conseil municipal, l’ancienne majorité démissionnaire
Ce vendredi 8 janvier, les agents de la police judiciaire passent à l’hôtel de ville, comme presque toutes les semaines, interroger certains employés municipaux, inspecter les ordinateurs, prendre des photos. A la mairie, on a le sentiment de « vivre dans une série télé ». Il est vrai que le scénario est prometteur : une baronnie sous les palmiers inquiétée par la justice, la mort du patriarche, une famille politique qui se déchire et une ville désormais presque coupée en deux.
D’un côté, les soutiens du nouveau maire, Yves Juhel, 76 ans. L’ex-deuxième adjoint qui a fait deux mandats aux côtés de l’ancien édile a été élu le 9 novembre par le conseil municipal. Il se présente dans la continuité de son prédécesseur, mais avec « des changements » : « de la transparence, notamment », précise-t-il actant une certaine prise de distance avec le système mis en place par Jean-Claude Guibal, qui de fait restera présumé innocent.
Yves Juhel a remporté l’élection avec 18 voix contre 17, soutenu par les élus de l’opposition à la suite d’un conseil municipal glacial. Mais les démissions en cascade de 21 élus de l’ancienne majorité dans la foulée du vote, de façon à provoquer une nouvelle élection, contraignent les Mentonnais à retourner aux urnes les 30 janvier et 6 février.
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