Les hydrates de méthane, énergie du futur ou bombe à retardement climatique ?
Les clathrates, également appelées hydrates de gaz ou de méthane sont des structures glacées qui renferment du méthane, un combustible mais aussi un puissant gaz à effet de serre. Cette source d'énergie des régions froides et abyssales pourrait être exploitée mais elle présente également une sérieuse menace pour l'avenir climatique de notre planète.
De la glace qui brûle !
Les hydrates de méthane ont été découverts au début du 19e siècle et trouvés régulièrement dans les années 1970 lors de forages pétroliers.
Les clathrates sont des structures solides, stables, qui résultent de la cristallisation d'un mélange d'eau et de méthane. Ils ressemblent à de la glace ; en fondant ils libèrent à la fois de l'eau et du méthane qui peut s'enflammer. En effet, ils ont la particularité de stocker les gaz sous une forme très concentrée. Les molécules d'eau forment une cage autour des molécules de méthane.
Les hydrates de méthane sont stables dans les sédiments marins à plus de 300-600 m de profondeur. Mais lorsqu'ils sont ramenés à la surface, la diminution de pression déstabilise la structure solide, le gaz est ainsi libéré et peut brûler si on l'enflamme, d'où l'expression « glace qui brûle ».Un réchauffement des eaux peut aussi provoquer la déstabilisation des hydrates et donc une libération du méthane. La zone la plus vulnérable aux changements de température est sur la partie supérieure de la pente continentale, où les sédiments contenant des gaz congelés entrent en contact avec les eaux océaniques plus chaudes.
Dans une étude publiée fin juillet 2020 dans Nature Communications, des chercheurs ont pu observer au large de Rio Grande (Brésil), un flux massif de méthane composé de centaines de points d’échappements de gaz qui remontent dans la colonne d'eau.
Cette découverte confirme, pour la première fois dans l’hémisphère sud, "une déstabilisation des hydrates de gaz consécutive au réchauffement de la température de l’océan dans cette zone. Elle est la preuve d’un déséquilibre thermodynamique entre la bordure de la zone de stabilité observée à partir des données sismiques et l’élévation de la température des eaux profondes compatible avec un réchauffement de l’océan sur plusieurs décennies."
Ces sédiments forment le plus grand réservoir de carbone sur Terre et représentent donc un enjeu majeur pour le climat.
Ces hydrates de gaz se forment sous forte pression et à basses températures. Ils pourraient notamment avoir été engendrés par la décomposition d'une vie bactérienne enfouie sous la terre.
Hydrates de gaz : danger pour notre avenir ?L'exploitation des réserves de clathrates a toujours été évitée pour des raisons de sécurité : ils sont inflammables et capables de couler un navire foreur avec l'émission de gaz qui modifient la densité de l'eau environnante.
Une source d'énergie colossale... Difficile à exploiter
Un mètre cube de clathrates peut contenir jusqu'à 165 mètres cubes de méthane, une aubaine avec la crise énergétique actuelle, d'autant plus que les réserves recensées en 2001 sont colossales : le double des réserves de gaz, de charbon et de pétrole réunis ! C'est-à-dire près de 10 000 milliards de tonnes de carbone.Pour autant, Jacqueline Lecourtier, directeur scientifique de l'Institut français du pétrole note qu' "Aujourd'hui encore, l'incertitude est terrible sur le montant des réserves d'hydrates de gaz".Pour le moment, Moins d'une centaine de gisements ont été trouvés ou fortement présumés le long des marges sous-marines et dans le permafrost des régions arctiques. Dans le Golfe du Mexique, les clathrates affleurent même et couvrent le fond de la mer.
L'extraction des clathrates est à la fois dangereuse et coûteuse, mais pour la première fois, un pas technologique notable a été franchi sur le site de Mallik, dans l'extrême-nord du Canada.En effet, ce site de recherche international a été créé pour l'étude des hydrates de gaz naturel de l'Arctique dans le delta du Mackenzie, au nord-ouest du Canada. Les valeurs élevées de saturation des hydrates de gaz, qui dans certains cas étaient supérieures à 80 % du volume poreux, ont permis d'établir que le champ d'hydrates de gaz de Mallik est un des réservoirs ayant la plus haute concentration d'hydrates de gaz au monde.En 2002, un consortium élargi de sept partenaires internationaux et de plus de 300 scientifiques et ingénieurs a permis le forage d'un puits d'une profondeur de 1200 m pour l'exploitation et de deux puits adjacents pour l'observation scientifique.
Un risque majeur pour l'aggravation de l'effet de serre
Le réchauffement climatique en cours entraîne notamment le dégel des permafrosts, ces sols normalement gelés en permanence. Ce phénomène pourrait alors libérer des quantités importantes de méthane avec la fusion des hydrates de gaz. Or le méthane est un gaz à effet de serre majeur 28 fois plus puissant que le dioxyde de carbone, même si sa durée de vie dans l'atmosphère n'est que d'une dizaine d'année contre des centaines pour le CO2.
Or, il y a 3 000 fois plus de méthane contenu dans les clathrates que dans l'atmosphère. Il s'en suivrait alors une accentuation très nette de l'effet de serre comme en témoigneraient certains événements similaires du passé de la Terre qui inquiètent les scientifiques.En effet, il y a 55 millions d'années, l'injection d'une masse colossale de méthane dans l'océan et l'atmosphère aurait entraîné l'augmentation de la température du fond des océans d'environ 4°C en 10 000 ans, un phénomène qui se serait produit également il y a 12 500 ans...
Notons enfin que selon le climatologue Hervé le Treut, "les hydrates de méthane ne sont pas pour l'instant intégrés dans les modèles climatiques" qui nous fournissent des prévisions sur l'ampleur duréchauffement climatique. Une donnée supplémentaire qui pourrait s'avérer catastrophique si la fusion venait à se généraliser...
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Christophe Magdelaine / notre-planete.info
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Citer cet article
Les hydrates de méthane, énergie du futur ou bombe à retardement climatique ? ; 02/09/2020 - www.notre-planete.info