Rolling Stone Travel : Ride rock en Harley Davidson - Rolling Stone
C’est donc dans un périple rock-biker au guidon la gamme Touring de Harley Davidson que s’est embarqué Rolling Stone dans une traversée des Pyrénées, de la Méditerranée à l’Atlantique, à travers les cols et en 3 jours. Route 66 ? Non, le 66 ici est le numéro du département de départ. “Get your motor runnin’/Head out on Highway !” Récit
L’histoire entre le magazine Rolling Stone et Harley Davidson remonte à plusieurs décennies. Au milieu des années 60, le journaliste Hunter S. Thompson, qui inventera le style “gonzo” – des articles où le journaliste lui-même est un des protagonistes du reportage –, a passé près d’un an avec le « club » de motards le plus célèbre du monde pour écrire le très réaliste et original Hell’s Angels, publié en 1967. Certes, il décrivait la vie plutôt rock’n’roll, voire méchamment punk avant la lettre, de ces regroupements d’inconditionnels de la marque de motos américaine Harley Davidson, qui à l’époque étaient au centre de nombreuses polémiques.
Dès 1968, année de changements majeurs, l’image de la célèbre marque de Milwaukee dans le Wisconsin gagnait ses galons de général grâce à Easy Rider, narrant les aventures et la vie dingue et idéalisée menée par Wyatt – Captain America – et son célèbre chopper au réservoir peint aux couleurs du drapeau américain, et de Billy, son acolyte, incarné par Dennis Hopper, par ailleurs réalisateur de ce film désormais cultissime dans les milieux de bikers, mais pas seulement. Un vent de liberté souffla alors sur grand écran et a inspiré de très nombreuses générations depuis.
Mieux encore et la liaison se fait sans effort car la bande originale de ce long-métrage atypique, voire expérimental – dans tous les sens du terme vues les conditions de tournages à l’image du changement de société qui s’opérait à la fin des sixties – deviendra aussi célèbre et que le film et générera aussi et surtout l’hymne imparable des amateurs du plus célèbre V Twin de l’histoire : l’incontournable « Born to Be Wild » de Steppenwolf. Les autres chansons du film ne sont pas en reste et de The Band à The Byrds en passant par Little Eva, The Electric Prunes et bien sûr Jimi Hendrix, le rock encerclera à partir de ce moment le monde du deux-roues… motorisé !
Plus un seul rassemblement de bikers ne se fera sans une grande scène montée et sans groupes de rock : ainsi des rendez-vous de Morzine et de Port Grimaud, de l’American Tours ou du pèlerinage de Sturgis dans le Dakota, mecque du biker et plus gros rasso au monde avec ses 500 000 participants. Un monde à lui tout seul. Le seul HOG, le club des propriétaires de la marque, compte plus d’un million de membres. Un véritable univers avec ses codes qui sont désormais bien loin des images des lointaines années soixante, ces clichés à « buzz » comme on pourrait les qualifier aujourd’hui.
Le goût de la route
La Terre a tourné depuis certes, mais les bikers ont gardé le goût de la route, de la fraternité et accueillent avec bienveillance les habitués de la marque comme le réalisateur Olivier Marchal, habituellement sur un modèle vintage, mais qui pour l’occasion et à la recherche de nouvelles sensations de pilotage, qui était du convoi. Était aussi de la partie l’ambassadeur de la marque en France, le musicien Manu Lanvin, dont nous avions déjà chroniqué les derniers albums et qui, avant de partir cet été en tournée, a réalisé Ici bas, le premier album de son père, l’acteur Gérard Lanvin. Mieux encore, Manu nous offrira un apéro rock, guitare acoustique en main, lors de la soirée à la seconde étape. Au programme : cover rock, soul et rhythm’n’blues. Mais les nouveaux venus ne sont pas en reste !
Manu Lanvin et Olivier Marchal étaient du ride, avec le Boss du HOG, Stéphane Sahakian
@kelseytoombah like it’s great that places offer it, but most of the time they don’t get that when vegan cheese mel… https://t.co/NqjVJbAcvU
— julia Sat Feb 27 05:41:31 +0000 2021
Ce fut le cas de l’auteur de ces lignes, fraternellement reçu par le patron de Harley Davidson France, Christophe Couet, qui, bien qu’accaparé par le lancement imminent d’un tout nouveau modèle, est venu accompagné ce « ride » ; mais aussi par le boss du HOG (Harley Owner Club), Stéphane Sahakian, un fou de rock en charge de l’organisation du prochain festival Morzine-Avoriaz Harley Days à l’été 2022, et enfin, le truculent président du Perpignan 66 Chapter, Salvador Verdu, qui chevauche l’un des modèles « trois-roues » de la marque et qui a concocté avec les membres de son club le road book de la virée pyrénéenne. Et quelle virée ! Une vingtaine de cols, des dizaines de virages en épingle, des vaches et des moutons sur la route et le tout répartis sur près de 750 kilomètres, de la concession HD de Perpignan à celle de Bayonne, avec arrêts au stand pour la nuit à Font-Romeu et à Loudenvielle. Et tout cela, en Touring, cette gamme de motos de route, née au cœur des années 50, avec la toute première Hydra Glide, si caractéristique avec son look très American Way Of Life, ses sacoches en cuir et son guidon en cornes de vache.
C’est cette même moto qu’enfourchera Elvis Presley… Et bien plus tard, un autre enthousiaste de la marque, un certain Bruce Springsteen, qui en possède plusieurs modèles. C’est donc au guidon d’une Touring Heritage Classic Vivid Black que votre serviteur, qui pour l’occasion avait ressorti de la naphtaline ses vieilles Chippewa et son Vanson rapé de motard rangé des voitures, s’est aligné sur la ligne de départ. Pour tenter de bien faire les choses, une remise en selle s’était avérée indispensable quelques jours plus tôt sur la piste de la Moto Ecole EasyMonneret située à Meudon. Une journée de stage intensif pour tenter de réapprendre les réflexes oubliés depuis plus d’une décennie de 4-roues-boitoto : parcours lents et rapides, circulation, bref, retrouver les fondamentaux du pilotage d’un deux roues.Il est 11 heures en ce lundi 28 juin, sous un soleil éclatant faisant miroiter les chromes, lorsque s’élance hors de la concess’ le convoi d’une quinzaine de bécanes représentant la totalité de la gamme Touring du constructeur américain – soit huit modèles, aux noms évocateurs de grands espaces et de routes infinies : du dépouillé Heritage Classic à l’élégant Road King, en passant par la sophistiquée Street Glide et les suréquipées Road Glide Special et Ultra Limited ou encore l’étonnant Tri Glide.
Au départ de la concession Harley-Davidson de Perpignan
D’est en ouest
La caravane est accompagnée par le camion d’assistance avec John au volant. John, c’est le gars qui s’occupe en particulier du Freedom Tour, une tournée des concessions de France où chacun peut aller essayer la totalité de la gamme. Mais pour ce « ride » Est-Ouest de la Méditerranée à l’Atlantique, il aidera, guidera et expliquera le fonctionnement de ces surprenantes machines au son si caractéristique. Si la conduite d’un engin de plus de 300 kg peut surprendre, elle n’en est pas moins facile d’appréhension une fois lancée qu’exigeante lors des manœuvres à basse vitesse. Mais une fois sur la route, le couple de camion des nouveaux V Twin Milwaukee Eight 107 et 114 (respectivement 1745 cm3 et 1868 cm3), soit les moteurs les plus puissants jamais montés sur cette gamme, et la position de conduite détendue, curieuse au départ, incroyablement étonnante à l’arrivée – commandes avancées, guidon large, assise basse –, permettent de se concentrer sur les trajectoires toutes en pleins et déliés. Grâce à son couple vertigineux les grandes courbes sont prises avec entrain, sans avoir à forcer.
- Devant le four solaire d’Odeillo, à côté de Font Romeu
- Pause devant les muraille de Villefranche de Conflent
Malgré ses dimensions, les Touring enroulent avec aisance, et si les échappements au son si caractéristique se font entendre, les systèmes audio embarqués et pilotables à partir de son portable sonorisent toutes la vallée et profitent de la caisse de résonance des collines alentours. Et à quinze bécanes, la discrétion n’est plus de mise. Mieux le tempo donné par la machine à 90 km/h sur nationales se cale naturellement sur « La Grange » de ZZ Top, « how, how how, how, Rumour spreadin’ ‘round ».
- Dans les lacets ariégeois
- Ascension du Col du Tourmalet
Les huit membres du Perpignan 66 Chapter, qui organise d’ailleurs son propre rendez-vous du 24 au 26 septembre prochains dans les Pyrénées orientales, dirige le « ride » vers les premiers contreforts de la chaine montagneuse séparant l’Espagne de la France. En tête de convoi, le road manager, Olivier Comandré, venu d’Avignon au guidon de son HD sur mesures ou presque. La particularité de ces motos est que chaque modèle, de par ses options, est unique. Bien qu’en groupe, on aime à se distinguer par la préparation de son engin. C’est aussi ça la philosophie de la marque fondée en 1903 par William Harley et Arthur Davidson. Les membres du club perpignanais de motards, des individualités loin d’être individualistes, assuraient donc le bon tempo du train de motos, qui s’étalait parfois sur plus de 300 m en file indienne dans les cols très resserrés, remontant ou descendant la caravane pour vérifier le bon déroulement de l’étape, tout comme d’ailleurs les deux photographes, auto-surnommés Looping et Futé – et même Loupé et Flouté –, qui tantôt à l’arrière d’une moto, tantôt en voiture, immortalisaient la virée. Ainsi, Jean-Luc, Christophe et Philippe s’intercalaient entre les invités et Alain avec “Salva” sur son Tri-Glide assuraient la fermeture de la marche, permettant ainsi un « ride » aussi chaleureux que kilométrique.
L’arrivée du convoi au sommet du col, à 2115 mCertes, pour cause de Covid et de frontières fermées, les routes transatlantiques sont encore interdites, alors autant en profiter pour redécouvrir les paysages grandioses qui s’ouvrent à chaque virage sur la route de cols pyrénéens. Notamment le plus fameux d’entre-eux, le célèbre Tourmalet, lieu de tant de victoires, que nous avons atteint peu avant 10 heures lors de la dernière étape. Le point de vue est à couper le souffle, et outre le fait de saluer la performance des cyclistes amateurs croisés dans les lacets et souffrant mille martyrs sur des pentes dépassant parfois les 10 % et qui se faisait un point d’honneur « d’y arriver », de notre côté, ces Touring ont montré que grâce à leurs aux performances qu’on peut qualifier de revigorantes, gravir des cols et « enchaîner les virolos » est aussi à la portée de ces machines incroyables.
Belkacem Bahlouli
Photos de Looping & Futé,Damien Lorrai et Lionel Beylot
Plus d’infos sur le site de Harley Davidson
Merci au Perpignan 66 Chapter pour le ride !