Au Nigeria, le difficile retour à la vie des habitants de Maiduguri, hantés par Boko Haram
ParLiza Fabbian (Maiduguri, Nigeria, envoyée spéciale)
Publié le 18 janvier 2022 à 19h00 - Mis à jour le 20 janvier 2022 à 05h34
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ReportageInsécurité, inflation, coupures d’électricité : la capitale de l’Etat du Borno, endeuillé par plus de dix ans d’exactions djihadistes, est toujours vulnérable.
Pour ne rien manquer de l’actualité africaine, inscrivez-vous à la newsletter du Monde Afrique depuis ce lien. Chaque samedi à 6 heures, retrouvez une semaine d’actualité et de débats traitée par la rédaction du Monde Afrique.A Maiduguri (Nigeria), les avenues du centre-ville sont bordées d’arbres luxuriants et de lampadaires ouvragés. En fin d’après-midi, des tournois de football sont organisés sur l’esplanade de l’imposante Mosquée centrale, inaugurée en 2019. Quant au tout nouveau viaduc urbain, orné de fresques aux couleurs vives, il est devenu un lieu de promenade prisé par les badauds. Le passage d’un pick-up de l’armée surmonté d’une mitrailleuse ramène pourtant bien vite à la réalité : celle d’une ville encerclée par des tranchées et surveillée nuit et jour par les militaires.
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Maiduguri, la capitale de l’Etat du Borno, a vu naître Boko Haram. Depuis plus d’une décennie, la région vit dans l’ombre de la secte islamiste et sous la menace de ses exactions. Une réalité que les gouverneurs successifs de l’Etat tentent de faire oublier à coups de grands « projets de développement », qui se chiffrent à plusieurs milliards de nairas, la monnaie nigériane. Elu en 2019, Babagana Zulum marche dans les pas de son prédécesseur, Kashim Shettima, en défendant « une vision de ce que pourrait être le Borno dans vingt ans. Un Borno qui renouerait avec sa longue histoire, pour redevenir “the home of peace”, “la demeure de la paix”, qui est la devise officielle de l’Etat fédéré », explique Vincent Hiribarren, directeur de l’Institut français de recherche en Afrique, situé à Ibadan (sud-ouest du Nigeria), et spécialiste de l’histoire de la région.
Malgré les efforts des dirigeants locaux pour faire de Maiduguri « la vitrine du Borno », la paix et la sécurité y sont des notions toutes relatives. Des incidents sécuritaires rappellent régulièrement la vulnérabilité de la capitale régionale.
Lire aussiAu Nigeria, plus de 200 personnes sont mortes dans des attaques menées par des hommes armésLe 23 décembre 2021, plusieurs explosions ont retenti dans la ville, une heure à peine avant l’arrivée du président nigérian, Muhammadu Buhari, en visite officielle. Des roquettes tirées par les djihadistes ont touché deux quartiers résidentiels. Quatre personnes – une femme et ses trois enfants – ont perdu la vie, huit autres ont été blessées. Cette attaque visait vraisemblablement l’aéroport de Maiduguri, qui sert aussi de base à l’aviation nigériane, au cœur de la stratégie militaire contre Boko Haram.
Sabotage de deux tours électriques
La ville est presque totalement coupée du réseau électrique national depuis un an. En janvier 2021, les djihadistes du groupe Etat islamique en Afrique de l’Ouest (Iswap) − une faction issue de la scission de Boko Haram en 2016 − ont revendiqué le sabotage de deux tours électriques à une cinquantaine de kilomètres de là. Deux mois de travail ont été nécessaires pour réparer les infrastructures endommagées dans cette zone très exposée. Enfin rétabli, le courant a été de nouveau interrompu trois jours plus tard, après une nouvelle opération de sabotage menée par l’Iswap.
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